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La correspondance de la Feldkommandantur

La France à l'heure allemande

Le 19 juin 1940, après une campagne éclair, les premiers soldats allemands entrent dans Quimper. Le 22 juin, l’armistice est signé : la moitié nord de la France et toute la façade ouest sont occupées. Dès juillet 1940 l’administration d’occupation se superpose à l’administration française mise sous tutelle. A Quimper la Feldkommandantur 752 prend la tête du département. Elle s’installe dans un premier temps à la préfecture, puis dans le bâtiment de la compagnie d’électricité Lebon à l’angle de la rue Théodore Le Hars et du quai Dupleix. Les horloges sont réglées sur l'heure allemande, hôtels, écoles, cinémas, manoirs sont réquisitionnés pour loger troupes, officiers et services administratifs.

La Feldkommandantur est chargée d’administrer le département et de mettre en application les missions dictées par le commandement militaire : contrôle du territoire, contrôle des autorités françaises et des populations, contrôle de l’économie. Le Finistère connait quatre feldkommandants de 1940 à 19441, le colonel Berendes (1940-1941), le général major Schubert (1941-1942), l’oberst Seebohm (1943), l’oberst Von Coler (1944). Elle est assistée d’un « groupe administratif », lui-même dirigé par un conseiller issu des rangs du haut commandement de l’armée. Dans le Finistère, ce poste est occupé par le colonel Vischer à partir de 1941.

(1) Alain Floch L’occupation allemande dans les 141 communes du Sud-Finistère (T1) (cote adf Q4MM94-1)

Les Kreiskommandanturen d’arrondissements, qui constituent l’échelon inférieur, s’installent dans les chefs-lieux d’arrondissement à Quimper, Brest, Châteaulin et Morlaix. Ces quatre villes resteront pendant toute la durée de la guerre des centres de garnison importants ; en particulier Brest, qui de par son port militaire devient le centre de commandement de la Kriegsmarine pour la Bretagne. Une base de lancement des U-Boots y est opérationnelle dès septembre 1941.

A cela s’ajoute quantité de services s'implantant un peu partout sur le territoire, en raison notamment de la position stratégique du département et de ses 1400 km de côtes (bande côtière interdite à la libre circulation pendant toute la guerre) : Ortskommandanturen (commandements militaires à l’échelon local), Gestapo (siège au 15 rue Laennec à Quimper), Feldgendarmerie, douane, propagande, Kriegsmarine, Luftwaffe, troupes etc… engendrant là encore de nombreuses réquisitions de bâtiments. De fait, rares sont les localités où l'armée allemande n'est pas présente.

Vivre sous l'Occupation

Dès le début de l’occupation se met en place un contrôle strict de l’administration et de la population.  La politique de collaboration du Maréchal Pétain, déployée à partir d’octobre 1940 (Rencontre de Montoire, lois d'aryanisation), renforce la domination de l'occupant : l'appareil d'état est désormais au service du régime nazi.

Les restrictions sont nombreuses, d’autant plus que l’entretien des forces d'occupation est à la charge de l’État français. Nourritures, vêtements, circulation, couvre-feu, combustibles pour le chauffage, essence : les privations sont multiples, le rationnement est décrété. De longues files d'attentes apparaissent devant les épiceries et le marché noir se développe. L’économie s’affaiblit, les entreprises tournent au ralenti, les traitements des fonctionnaires sont bloqués. Pour empêcher les évasions, la pêche est interdite au-delà de 3 miles des côtes, ce qui provoque son effondrement. L'approvisionnement des commerces alimentaires devient difficile et aléatoire, la production agricole étant réquisitionnée presque intégralement par le ravitaillement général pour satisfaire aux exigences de l’occupant.

Malgré les restrictions et la répression, les loisirs occupent une part importante dans la vie quotidienne de cette période. La pratique sportive se développe notamment, favorisée par la révolution nationale du Maréchal Pétain qui prône l'exercice physique. Les municipalités arrivent ainsi à glaner de rares subventions pour s'équiper en installations. Ce développement ne résulte pas d'une adhésion de masse à la propagande vichyste, mais plutôt d'une recherche de distraction pour rompre avec un quotidien difficile. Les cinémas font également salle comble, exception faite des films de propagande nazie. De nombreux bals nocturnes sont organisés dans les campagnes malgré leur interdiction, comme l'atteste les multiples plaintes et confiscations d'instruments répertoriées (Adf 200 W 301-307).

Pendant quatre années, les Français vivent au contact de l'ennemi et de la bureaucratie du régime nazi qui détient tous pouvoirs de décision. Chacun est un jour ou l'autre confronté au besoin de solliciter l'occupant pour une demande de laisser passer, d'informations sur un prisonnier, d'ouverture de commerce etc. Les propagandes nazie et vichyste de la "révolution nationale" s'affichent sur les murs des villes et villages, contribuant à maintenir la population sous tension.

Français et Allemands pendant la guerre

La cohabitation forcée provoque régulièrement tensions et rixes, notamment dans les débits de boissons brestois où un couvre-feu est instauré dès 1941. Cependant, jusqu'en 1942, l'opinion est partagée sur la politique de collaboration. Une majorité de Français s'accommodent de la situation sans pour autant l'approuver, la jugeant préférable au chaos de l'été 1940. Bien qu'un sentiment germanophobe imprègne une partie de la population, nombreux sont ceux qui tissent des liens professionnels et personnels avec les Allemands. La résistance est encore minoritaire, et on préfère alors détourner le regard des persécutions et des exécutions. Si les grands réseaux de résistance apparaissent en Finistère dès 1941, ils ne prennent leur essor véritablement qu'à partir de 1943.

L'été 1942 marque cependant un tournant. L'intensification de la politique antisémite et collaborationniste (retour au pouvoir de Pierre Laval), la multiplication des rafles et arrestations, la répression de plus en plus violente, et l'envahissement de la Zone libre maintiennent la population dans un climat de peur et de défiance à l'égard de Vichy. Les actes de résistances sont en constante augmentation, tout comme les arrestations et les exécutions. Révélateur de ce durcissement, la Gestapo ouvre un deuxième centre de détention en octobre 1943 à Quimper dans l'école Saint-Charles.

Cette guérilla se poursuit jusqu'à la libération (avec des opérations d'envergures comme le vol et la destruction des 44 000 dossiers du STO en janvier 1944), provocant en retour une violente répression. On vit également avec la peur des bombardements qui s'intensifient, en particulier le long des côtes. Le sentiment est donc partagé entre un désir de résistance motivé par les victoires alliées et une peur des représailles. De fait arrestations, déportations et exécutions continuent jusqu'au début de l'été 1944.

Effectuer une recherche dans la correspondance de la Feldkommandantur 752

De cette administration omnipotente est issue une correspondance abondante (tenue en Français et en Allemand) avec la Préfecture du Finistère. La multitude et la diversité des sujets traités sont révélatrices du climat de contrôle permanent et de la répression exercée : permis de circuler, surveillance, persécutions, spoliations, programmation des cinémas, envoi de marchandises, réquisitions, arrestations, marché noir, transfert de prisonniers, exécutions etc... Il s’agit d’un témoignage direct du quotidien pendant la guerre, qui permet de mieux appréhender les conditions de vie des Finistériens sous l'Occupation.

La correspondance de la Feldkommandantur a été versée aux Archives départementales par le Cabinet du Préfet (versement 200 W). Elle a été intégralement numérisée (articles 1 à 26). Vous pouvez effectuer :

- une recherche plein texte sur l'objet de la correspondance

- une recherche dans le répertoire du versement 200 W

 

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