Histoire Plan des bois de l’abbaye Saint-Guénolé de Landévennec. 1752. Archives départementales du Finistère, 2 H 92 À la fin de l’indépendance bretonne, la monarchie française hérite des massifs forestiers des anciennes châtellenies ducales. Ces derniers relèvent, à partir de 1545, de la juridiction unique du nouveau siège royal de la Maîtrise des eaux et forêts de Bretagne, subdivisée en neuf circonscriptions forestières, dont celle de Carhaix, compétente au final, dans une large mesure, sur le territoire de l’actuel département du Finistère. À côté du domaine royal, forêts, bois et « bois de décoration » dépendent également à l’époque de grands feudataires, de seigneuries laïques ou ecclésiastiques (évêchés, abbayes, monastères). Certains sont affermés à des particuliers et exploités par eux. Sur leurs lisières s’activent bûcherons, charbonniers, sabotiers, fabricants d’outils et d’ustensiles divers. Dans le bocage, les émondes des bois de haies ou « de fossés » sont surtout employées pour le chauffage ; les entraves à la libre disposition des essences nobles par les « preneurs » de baux à domaine congéable, particulièrement nombreux en Basse-Bretagne, y sont tatillonnes et décriées. La ressource semble mal gérée. Au cours des XVIe et XVIIe siècles, la Bretagne perd progressivement son manteau forestier au profit des landes et des « terres chaudes », sous les effets conjugués des défrichements, de la surexploitation liée, notamment, aux besoins croissants des arsenaux de la Marine, des mines et des forges, de l’absence de repeuplements, des usurpations et droits d’usage... L’ordonnance préservatrice sur les eaux et forêts, édictée par Colbert en août 1669 est, semble-t-il, mal relayée dans la durée par les errements et l’incurie des Maîtrises bretonnes, provoquant une disette et un renchérissement de la ressource qui cristallisent les mécontentements dans les dernières années de l’Ancien Régime. Supprimées par un édit de mai 1788 au profit des présidiaux, les Maîtrises demeurent de fait en activité jusqu’en l’an IX (1800-1801), la Révolution ayant laissé un temps l’administration des eaux et forêts dans un flou réglementaire, en dépit de dispositions adoptées par décrets des 20 août au 15 septembre 1791. Les bois et forêts nationaux issus des confiscations révolutionnaires sont soumis au nouveau régime forestier, l’État en disposera avec moins de ménagement encore. L’article premier de la loi du 29 septembre 1791 instaure en revanche une liberté totale pour les propriétaires de bois particuliers. Le bail à domaine congéable, si décrié dans les cahiers de doléances de 1789, est supprimé puis rétabli par la loi du 9 brumaire an VI (30 octobre 1797) et toujours en usage aujourd’hui dans notre Code rural, sous les articles L 431-1 à 23. Où et comment chercher ? Séries d'archives Les questions relatives à la possession, l’exploitation et l’usage des forêts et des espaces forestiers, boisés ou bocagers ont donné lieu à la production d’archives nombreuses et disséminées. Les ensembles les plus homogènes sont conservés dans la série B (Cours et juridictions d’Ancien Régime). Il s’agit : des fonds de la Maîtrise particulière des eaux et forêts de Cornouaille, Léon et Tréguier à Carhaix, et de la gruerie royale de Quimperlé (sous-série 21 B) des fonds de certaines cours royales ordinaires (sous-séries 1 B, 5 B et 8 B) et de quelques cours seigneuriales (sous-séries 14 B, 19 B et 24 B) de la collection des cahiers de doléances de 1789 (sous-série 10 B). Il s’en trouve également de manière plus éparse dans les archives administratives de la période révolutionnaire (sous-série 1 Q et série L), dans les documents du cadastre napoléonien (sous-série 3 P), les archives du clergé (séries G et H), les actes du pouvoir souverain (série A), les minutiers des notaires (sous-série 4 E) et les archives de l’administration du Contrôle des actes (sous-série 5 C à 39 C). Cette liste n’est pas exhaustive. Certaines pistes de recherches sont suggérées par des exemples. Série B Sous-série 21 B (Maîtrise particulière des eaux et forêts de Cornouaille, Léon et Tréguier à Carhaix, et de la gruerie royale de Quimperlé) Le ressort de la Maîtrise siégeant à Carhaix, s’étend sur les diocèses de Léon, Cornouaille et Tréguier. Sa compétence, définie par les édits de février 1689 et de mars 1707, porte sur l’administration et l’exploitation des eaux et forêts, ainsi que sur la poursuite et la répression des infractions de toute nature (civiles, criminelles et de police) qui s’y commettent : coupes illégales et dégradations de bois, conflits de propriété, crimes commis dans ces périmètres, délits de chasse et de pêche, navigation fluviale….). À signaler particulièrement dans cet ensemble : les états, procès-verbaux des visites générales et particulières des forêts ; les procès-verbaux d’assiettes, de martelages et de récolements, les procès-verbaux d’arpentages, de descentes, de délits ; les rapports des gardes forestiers ; les états, déclarations et visites des bois destinés aux arsenaux de la Marine…. Le fonds comporte en outre de nombreux plans d’arpentage. Sous-séries 1 B, 5 B et 8 B (Cours royales ordinaires) En dépit de la compétence en théorie exclusive de la Maîtrise des eaux et forêts de Carhaix, certaines cours royales se saisissent parfois de délits en ces matières. C’est le cas notamment des juridictions ordinaires de Brest, Concarneau et Quimper. Des procès sont instruits pour dégradations, enlèvements ou vols de bois. Voyez, à titre d’exemples, les dossiers cotés B 1308, B 1317, B 1936, B 2122 et B 2134. À noter également la présence dans ces fonds de bannies d’afféagement, d’actes d’appropriement et d’adjudications de bois, de prestations de serment d’arpenteurs… Sous-séries 14 B, 19 B et 24 B (Cours seigneuriales) Certaines juridictions locales (du Grannec – 14 B, de Riec – 19 B, du Relecq – 24 B…), conservent un droit de justice sur les délits mineurs commis dans les bois seigneuriaux. Leurs décisions sont portées en appel devant les juges de la Maîtrise de Carhaix. On trouvera dans ces fonds des registres d’audiences, procès-verbaux de descentes des juges, rapports de gardes des bois, procès-verbaux de captures de bestiaux, saisies… Sous-série 10 B (Cahiers de doléances) De nombreuses revendications alimentées par les diverses entraves à la libre disposition des bois (dans les baux notamment), à leur rareté et à leur cherté, particulièrement à la fin de l’Ancien Régime, sont portées par les cahiers de doléances de 1789. Voyez, à titre d’exemples, les cahiers des paroisses d’Audierne, d’Esquibien, de Goulien, de Plozévet, de Pont-Croix et de Pouldreuzic (10 B 22). Les originaux de ces documents se trouvent majoritairement en série B. Accéder aux cahiers de doléances numérisés. Sous-série 1 Q et série L Dans la sous-série 1 Q (domaines nationaux), les articles 1 Q 1073 à 1 Q 1090, 1 Q 1181, 1 Q 1451 à 1 Q 1455, 1 Q 1566, 1 Q 1585, 1 Q 1852 et 1 Q 2811 sont consacrés au séquestre, à l’adjudication et à l’abattage des bois et forêts confisqués de première origine (clergé, biens de la Couronne…) et de deuxième origine (émigrés et fugitifs, condamnés à mort, ressortissant des pays ennemis…). Les états et expertises qu’ils contiennent livrent d’intéressants détails sur la situation, la nature et l’étendue des boisements à la fin de l’Ancien Régime (taillis ou futaies, essences, bois de marine…). Des compléments peuvent être recherchés en série L (administrations et tribunaux de la période révolutionnaire), dans les fonds du département ( 13 L) et ceux de certains districts ( 22 L, 23 L et 26 L). Le district de Carhaix (22 L) contient des rapports de M. Veller, administrateur des bois nationaux en Basse-Bretagne. Sous-série 3 P Le cadastre parcellaire finistérien est élaboré à partir de 1808. Il se compose pour chaque localité d’un plan, d’un état de sections et d’une série de matrices cadastrales. Sur le plan figurent notamment toutes les parcelles numérotées de la commune. L’état de sections en constitue la légende, parcelle par parcelle. Il en précise le nom – très majoritairement en langue bretonne –, la nature et la contenance. Bien qu’élaborés postérieurement à la Révolution, ces deux documents constituent des sources intéressantes pour les études liées à l’histoire du paysage rural et à la toponymie des périmètres boisés ou bocagers héritée de l’Ancien Régime. Les plans et états de sections sont numérisés et consultables sur notre site internet. Accéder à l'espace de recherche dans le Cadastre. Séries G et H Série G (clergé séculier) Certains registres des délibérations des Généraux de paroisses ( sous-séries 15 G à 321 G) peuvent comporter des transcriptions des cahiers de doléances de 1789. Pour en savoir plus, consultez la publication "Les Bretons délibèrent 1780-1800" (cote bibliothèque des Archives : Q4N 45 et B4N 45). Les rentiers, aveux, titres par paroisses, comptes et procès conservés dans les fonds des évêchés et chapitres ( sous-séries 1 G, 2 G, 5 G et 6 G) sont susceptibles de contenir des informations relatives aux espaces boisés des biens tenus en fief. Voyez, à titre d’exemples : dans les titres par paroisses, le dossier consacré aux plantations et abattages effectués dans le parc du manoir de Lanniron, à Quimper (1 G 99) dans un rentier de l’évêché de Léon, le montant des redevances acquittées pour le manoir de Coat-an-Escop et ses dépendances, en Lampaul-Guimiliau (5 G 491) dans compte du temporel de l’évêché de Cornouaille de 1755, le passage relatif à l’acquisition d’un bois taillis en Kerfeunteun (1 G 395). Série H (clergé régulier) L’histoire des abbayes et des monastères se confond parfois avec celle de certains espaces forestiers (Landévennec, Saint-Maurice…), concédés aux moines par les ducs de Bretagne, certains grands feudataires, les évêques. Outre les dossiers biens repérés par les inventaires sur la question des bois (marchés, plans, procès et transactions, délits et gardes forestiers…), on investiguera notamment avec profit les actes de fondation des établissements, les donations, les aveux et déclarations, les comptes et les rentiers, les actes de réformation des domaines, les baux… Voyez, à titre d’exemple, le fonds de l’abbaye Saint-Guénolé de Landévennec ( Sous-série 2 H). Série A À l’instar de plusieurs autres, la série A (actes du pouvoir souverain et domaine public) renferme des aveux et dénombrements fournis au roi, pour des fiefs, seigneuries et juridictions, dans lesquels sont mentionnés les espaces boisés. Voyez, à titre d’exemples : le dénombrement en [1681] de Jacques Alain, sieur de La Mare, pour le manoir de Kerbrat, ses bois, terres et dépendances, en Scrignac (A 9 – folios 658 et suivants). Kerbrat fut incendié en 1675, lors de la révolte du papier timbré ; la déclaration de [1687] du temporel de l’évêché de Léon (Regaires de Saint-Gouesnou), énumérant les différents manoirs tenus par les vassaux, leurs bois taillis, de « décoration » et de haute futaie (A 44) À signaler également dans cette même série, un dossier (A 41) consacré aux bois du roi, couvrant la période 1641-1790. Sous-séries 4 E et 5 C à 39 C Les baux agricoles à domaine congéable, très répandus à l’époque dans le Trégor, le Vannetais et la Basse-Cornouaille (moins dans le Léon), constituent également une source intéressante pour l’étude des espaces bocagers. On y trouvera le détail des diverses entraves à la libre disposition par le « preneur » de certaines espèces ou essences de bois. Ces types de baux sont à rechercher dans les collections de minutes notariales, placées dans la sous-série 4 E (archives notariales). L’accès y est facilité pour la seconde moitié du XVIIIe siècle, par l’existence de répertoires chronologiques. Pour en savoir plus, consultez l'espace de recherche dans les Archives notariales. Les mentions de ces mêmes actes peuvent également être recherchées en série C (administrations provinciales avant 1790), dans les registres de l’Administration du contrôle des actes, via les tables des baux. Pour en savoir plus, consultez l'espace de recherche dans le Contrôle des actes. Bibliothèque des Archives En savoir plus sur la bibliothèque des Archives Une édition commentée de l’Ordonnance des eaux et forêts d’août 1669, complétée d’une table des titres et d’une table alphabétique des matières a été publiée en 1782 (cote bibliothèque des Archives : Q8K 238) Une Nouvelle instruction pour les gardes généraux et particuliers des eaux et forêts, publiée en 1765, compile l’ensemble des édits, arrêts et règlements sur le sujet (cote bibliothèque des Archives : Q8K 237). Les notices communales du Dictionnaire historique et géographique de la province de Bretagne, 1778-1780, de Jean-Baptiste Ogée, peuvent comporter des descriptions et surfaces des bois ou forêts des localités étudiées. Voyez, à titre d’exemple, la notice consacrés à la forêt de Carnoët – commune de Clohars-Carnoët. (cotes bibliothèque des Archives : Q4D 1 1-2). Le régime du domaine congéable est présenté dans le recueil des Usages et règlements locaux en vigueur dans le département du Finistère, de J-M. P. A Limon (Cote bibliothèque des Archives : Q8KK 1). La bibliothèque des Archives conserve plusieurs ouvrages ou articles sur ce régime particulier de fermage. À signaler notamment, un article d’I. Guégan sur le domaine congéable et les bois fonciers en Basse-Bretagne au XVIIIe siècle, intitulé "Les arbres de la discorde". Pour en connaître le détail, accéder à l'inventaire des ouvrages concernant le domaine congéable de la bibliothèque historique. Plusieurs articles consacrés aux bois et forêts de Bretagne ont été publiés dans le Bulletin de la Société Archéologique du Finistère et les Annales de Bretagne. Ils sont consultables en usuels dans nos salles de lecture (le Bulletin, à Brest et Quimper ; les Annales, à Quimper). Pour en savoir plus, consultez les tables qui s’y rapportent. Les auteurs indiquent le plus souvent leurs sources en archives. Les actes du congrès de Montfort-sur-Meu, consacré à la forêt en Bretagne, sont publiés dans le volume 94 (2016) des Mémoires de la Société d’Histoire et d’Archéologie de Bretagne. Les différentes contributions renvoient notamment aux sources conservées aux Archives départementales de Loire-Atlantique : rentiers domaniaux suscités par la réformation du domaine, aveux (série B) ; comptes (série E). Ce volume est consultable en usuel dans notre salle de lecture de Quimper. Sources complémentaires Aux Archives départementales du Finistère La documentation constituant le volet finistérien du pré-inventaire des parcs et jardins de Bretagne, conservée en série W (Archives publiques postérieures à 1940), sous le numéro 239 W, constitue une intéressante compilation, toutes périodes et tous supports confondus, des sources disponibles sur les bois d’ornement, les allées et arbres de caractère plantés au voisinage ou dans les parcs des châteaux ou manoirs du département, et souvent mis en exploitation à la Révolution. Les dossiers y sont classés par localités. Des synthèses de ces travaux sont également disponibles (cote bibliothèque des Archives : TR 92 et 93). Les dossiers de familles placés dans la sous-série 1 E (Familles) sont également susceptibles de contenir des chartriers ou des ensembles plus restreints (baux, marchés…) relatifs à la possession et à la gestion des forêts, bois et taillis. On y trouve ainsi des aveux et dénombrements reçus des vassaux ou rendus au seigneur suzerain, qui énumèrent, parfois dans le détail, la consistance des biens détenus, parmi lesquels figurent les espaces boisés ou forestiers. Le propriétaire procédant rarement par lui-même à la taille et à la vente des bois, on y trouve également des ventes et adjudications en relation. Voyez, à titre d’exemples : les marchés de bois passés aux XVIe et XVIIe siècles par les seigneurs de Lesquiffiou, en Pleyber-Christ (1 E 171) le procès relatif aux dégradations commises au XVIIIe siècle dans des bois dépendant de l’abbaye de Daoulas (1 E 1231). La sous-série n’est couverte par aucun instrument de recherche structuré. L’accès aux dossiers s’effectue uniquement grâce à un index sommaire des noms de familles. La série J (Archives privées) est également susceptible de receler des documents en rapport avec l’économie forestière, ainsi : des aveux, dénombrements, ventes et adjudications peuvent aussi se retrouver dans les chartriers des seigneuries. Voyez, à titre d’exemple, l’inventaire des archives de Kérouzéré ( 151 J) certains petits fonds sont susceptibles de contenir des actes de gestion de forêts de Bretagne et des provinces voisines, des pièces relatives aux transports de bois vers Brest… Voyez, à titre d’exemple, le fonds Louis-Jacques Guillery, sieur de Marguerin, commis principal de la Marine (1 J 184). Au Service Historique de la Défense - antenne de Brest L’antenne brestoise du Service Historique de la Défense est susceptible de détenir des fonds concernant la forêt du Cranou. Située sur Hanvec, Le Faou et Rumengol, elle dépendait directement de l’intendance de la Marine à Brest. Aux Archives départementales d'Ille-et-Vilaine De la Maîtrise des eaux et forêts de Carhaix, les appels en matière de délits forestiers sont portés au siège de la Table de Marbre, chambre spéciale du Parlement de Bretagne. Les archives de cette juridiction sont conservées dans la sous-série 5 B des Archives départementales d’Ille-et-Vilaine. Dans la série C (Administrations provinciales avant 1790) de ce même service d’Archives, sont conservés différents dossiers relatifs aux eaux, bois et forêts royales en Bretagne. Voyez notamment les articles 1474 et 3477 à 3479. À signaler également : le fonds de la Chambre souveraine pour la réformation générale des eaux, bois et forêts de Bretagne (1664-1665), conservé sous la cote Bj 1 à 19. le rapport d’Antoine Builloud, général des finances de François 1er pour le domaine breton, conservé sous la cote 1 F 1127. les résultats de la grande enquête de 1783 sur les bois de futaie et les bois taillis, conservés sous la cote C 1634. Aux Archives nationales Aux Archives nationales sont conservées : dans la série G (Administration des eaux et forêts), différents dossiers relatifs à l’administration des forêts de Bretagne. Voyez notamment les articles AN G3 10 et AN G3 12. dans la série N (Cartes et plans), sous la cote AN IV 1 Finistère, les pièces consécutives du réarpentage général de la gruerie de Quimperlé, effectué en 1730, sous la direction du géomètre Robert.