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Pétrole en mer d'Iroise

Dès 1971, six sociétés (Esso, Shellrex, Elf, SNPA, CFP et BP) s'associent et déposent auprès du ministère du développement industriel et scientifique des demandes de permis exclusifs de recherches d’hydrocarbures portant sur le plateau continental dans la Manche et l’Océan Atlantique.

A une période où le chômage ne cesse d'augmenter, la tentation est grande de voir venir s'installer les compagnies pétrolières et avec elles, une économie florissante génératrice d'emplois. Pêcheurs, habitants, élus, tout le monde s'interroge quant au bien-fondé et à la viabilité d'un tel projet au large des côtes finistériennes.

Au centre de ces préoccupations, l'environnement, dont la protection constitue le cheval de bataille des comités locaux des pêches qui voient dans ces forages un danger pour la réserve halieutique et donc pour leur profession. Tout comme l'implantation d'un port pétrolier divisa fortement la région à la fin des années 1960, la découverte de gisements de pétrole inquiète. Dans un département où la pêche et l'ostréiculture sont encore des activités majeures, l'installation de plate-formes pétrolières fait planer la menace de la pollution permanente du littoral qui entrainerait des effets irrémédiables sur les ressources naturelles. Menaces qui s'accentueraient et se concrétiseraient si d'éventuels gisements étaient découverts.

A ces difficultés d'ordre local, s'ajoute un problème international puisque la France et l'Angleterre ne sont pas d'accord sur le tracé de la frontière entre les plateaux continentaux des deux pays. En résulte un imbroglio juridique qui se règle à grand renfort d'expertises sur fond d'intérêts nationaux.

Revue de presse

La pression s'intensifie en octobre 1973 avec le premier choc pétrolier. La production mondiale diminue, les cours du baril flambent. La nécessité de trouver de nouveaux gisements pour tendre à l'indépendance énergétique devient donc une priorité. La mer d'Iroise qui n'avait jusqu'à présent fait l'objet d'aucun forage devient l'objectif prioritaire des compagnies, d'autant plus que des études menées préalablement laissent espérer que la zone abriterait un riche gisement. La première autorisation de prospection est octroyée à la Société nationale des pétroles d'Aquitaine sous certaines contraintes : interdiction de l'emploi de charges explosives, aménagement des programmes de recherches de manière qu'elles ne coïncident pas avec les périodes de pêche saisonnières, interdiction de toute recherche ou exploitation à l'intérieur d'une bande de dix milles à partir de la côte.

Le littoral est divisé en trois zones : Iroise, Armor et Celtique. La prospection débute en mai 1975 avec l'arrivée de la plateforme semi-submersible "Pentagone 84" dans la zone dite "Armor" sur le site de "Lizenn 1" (la sole en breton) à 60 km au nord-ouest d'Ouessant. Deux autres forages se mettent rapidement en place, "Lenkett" (le mulet) dans la zone Iroise et Brezell (le maquereau) dans la zone Armor. Rapidement les forages de prospection se multiplient. La force des courants et de la houle en mer d'Iroise constituant des contraintes importantes, ces trois premiers forages sont l'occasion d'étudier la faisabilité de l'implantation durable de plateformes dans la région.

A ce titre, le rapport de l'ingénieur des mines quelques jours avant la fin de cette première campagne met en avant ces contraintes naturelles délicates : " Le forage de Lizenn 1 [...] a mis en évidence l'importance des courants au large des côtes du Finistère. Cette importance est préjudiciable au niveau du déplacement de la plate-forme et également au niveau de la bonne tenue du riser. [...] Les conditions météorologiques en mer d'Iroise risquent d'entrainer des arrêts de forage et déconnections du riser assez fréquents."

Cette première expérience est peu concluante, le puis n'a atteind aucun gisement de pétrole, et techniquement l'installation de plates-formes apparait très compliquée. Cependant, au printemps 1978 deux nouveaux forages sont programmés en zone Mer Celtique : Glazenn 1 et Levneg 1. Le contexte local a évolué puisqu'en mars de la même année, les côtes finistériennes ont été souillées par la marée noire dû au naufrage de l'Amoco Cadiz. Déjà en 1976 les naufrages successifs de l'Olympic Bravery et du Böhlen faisaient poindre les dangers résultant de l'exploitation du pétrole. Si l'écologie et la sauvegarde du littoral deviennent à l'orée des années 1980 de nouvelles préocupations, cette campagne de prospection pétrolière et la menace éventuelle d'une exploitation intensive ne sont que peu relayée dans la presse locale.

Cette fois encore, le pétrole espéré n'est pas au rendez-vous. Les forages s'échelonnèrent jusqu'en 1985. Aucun des sédiments prélevés sur ces différents puits ne révéla la présence de pétrole au large de la Bretagne.
 

Cartographie des forages

L'exemple d'Aberdeen à l'Est de l'Ecosse, qui s'est vue profondément transformée par la découverte de pétrole en mer du Nord